Les services du ministère de l’agriculture viennent de rendre public les premiers chiffres du recensement agricole 2020. Les résultats nous donnent la possibilité d’avoir à la fois une lecture positive et négative des grandes tendances qui se dessinent. Nous tenterons d’être objectif et surtout lucide sur la réalité socio-économique de ce secteur primaire à fortes potentialités qui ne parvient toujours pas à prendre la véritable dimension de son autonomie alimentaire et de la maitrise de ses filières de productions.
La décennie qui s’achève (2010/2020) semble marquer la fin de l’érosion démographique des actifs agricoles. Avec 2934 exploitants agricoles recensés en 2020 (soit une progression de 133 sur 10 ans – + 4,7%), la CORSE est la seule région de France avec la GUYANE à noter une augmentation de sa population. Nous représentons 0,75 % de la population active agricole Française et 3,4 % de la population active Corse (ce chiffre prend en compte les 4500 Équivalents Temps Plein recensés – chefs d’exploitations agricoles, salariés permanents et saisonniers).
Les productions végétales représentent 41% des exploitations agricole recensées et 70% de notre PIB agricole. Les productions animales sont majoritaires en nombre (59%) mais représentent à peine 20 % de l’activité économique consolidée. Les 2/3 des exploitations agricoles Corses se situent en Haute – Corse.
Les raisons de cette situation que l’on peut qualifier de « bonne surprise » au plan des chiffres cache des phénomènes masqués plus inquiétants :
- Un vieillissement de notre population d’actifs qui reste plus marqué que sur le continent.
- Un âge moyen de départ à la retraite plus avancé que les moyennes constatées au plan national.
- Un accroissement significatif du nombre d’exploitant(e)s agricoles à titre secondaire et de cotisants solidaires.
Le paysage insulaire reste au ¾ composé de petites exploitations dont les 2/3 représentent les filières d’élevage bovins, ovins et caprins. En revanche les 286 plus grandes entreprises, à fort potentiel économique sont des exploitations spécialisées en viticulture (136) et en arboriculture (110).
Le décrochage inter-filière semble s’inscrire dans la durée et les risques d’affaissement économique menacent lourdement nos productions traditionnelles.
Les Surfaces Agricoles Utiles dédiées à la production sont stables autour de 168 000 Ha avec une nette progression des cultures pérennes qui progressent de 1000 Ha en 10 ans. Les vergers absorbent les ¾ de cette hausse. Ces chiffres confirment, s’il en est, les bases surfaciques indispensables à l’acte de production !
Au-delà des chiffres, les grandes caractéristiques de notre agriculture insulaire peuvent se résumer ainsi :
- Un agriculteur sur 4 est une agricultrice
- 17,3 % de nos exploitations agricoles sont impliquées dans une démarche agriculture biologique
- 34,9 % des productions Corses sont placées sous un signe de qualité (SOQI)
- 79,3 % des productions agricoles sont commercialisées en circuit court
En projetant à l’identique les dynamiques actuelles, on peut imaginer qu’en 2030 (effet vieillissement) il pourrait y avoir autour de 2600 exploitations agricoles faisant travailler 2350 agriculteurs (1900 ETP) et 10000 Salariés (3000 ETP). Cela représenterait 300 agriculteurs (CE) en moins et 1000 salariés en plus. La restructuration de l’agriculture Corse est donc confrontée à un phénomène de ralentissement structurel qu’il convient de prendre en considération. Elle reste constituée d’exploitations de taille très modeste et l’enjeu du salariat agricole devient une question majeure pour ce secteur d’activité.